Littérature (très) savante

Je dirais plutôt : ils défendent ce qu’ils croient être une tradition française de littérature pour l’élite.
Au XIXe siècle la littérature de genre est très représentée et ses auteurs bénéficient d’une reconnaissance certaine : Jules Verne, Gaston Leroux, Paul Féval, Villiers de l´Isle-Adam, pour ne citer qu’eux. En revanche, je te rejoins sur le présent : actuellement ils ne veulent rien promouvoir que de pré-digéré ou faussement sulfureux pour un bon bad buzz, mais ils se fichent royalement de la qualité ou de la variété des textes.
Je lisais beaucoup de littérature contemporaine (de la blanche, donc, mais sans savoir qu’on l’appelait comme ça) il y a encore quelque années, notamment amerloque. Mais quand on a lu deux bouquins de Paul Auster ou de Nancy Huston, on les a tous lus. Alors je suis retourné à Julien Gracq...

En même temps l'on se rend compte que l'on privilégie la littérature tensive à la littérature narrative. Les tensions entre personnages sont plus importante que le schéma de quête qui conduit à la transformation sémiotique.

Gallimard :

Monica Sabolo / Eden

« Un esprit de la forêt. Voilà ce qu’elle avait vu. Elle le répéterait, encore et encore, à tous ceux qui l’interrogeaient, au père de Lucy, avec son pantalon froissé et sa chemise sale, à la police, aux habitants de la réserve, elle dirait toujours les mêmes mots, lèvres serrées, menton buté. Quand on lui demandait, avec douceur, puis d’une voix de plus en plus tendue, pressante, s’il ne s’agissait pas plutôt de Lucy – Lucy, quinze ans, blonde, un mètre soixante-cinq, short en jean, disparue depuis deux jours –, quand on lui demandait si elle n’avait pas vu Lucy, elle répondait en secouant la tête : "Non, non, c’était un esprit, l’esprit de la forêt." »

Encore un exemple affligeant.

Tous ces machins donnent le sentiment d'avoir été jetés sur le papier comme ça vient. La culture du relâché.

A la suite de Fabien, je regarde les sorties des romans de la rentrée chez Gallimard. Présentations officielles de l'éditeur :

Les choses humaines, de Karine Tuil :

"Le sexe et la tentation du saccage, le sexe et son impulsion sauvage sont au cœur de ce roman puissant."

Rose Désert, de Violaine Huisman :

"En revisitant ses rapports aux hommes depuis l’adolescence, elle aborde avec une sincérité rarement égalée les tabous de l’éveil à l’amour et à la sexualité."

Une histoire de France, de Joffrine Donnadieu :

"Toul, 1999. À neuf ans, Romy est abusée pour la première fois par France, une voisine."

Décidément, c'est aventureux, puissant et original, la littérature bourgeoise.

L'intérieur est encore pire, toi tu peux te contenter de ne lire que les résumés

J'ai trouvé une phrase pour résumer ça : la littérature des égos malades et de la perversion sexuelle.

Je croyais exagérer un peu.
Et avec ça je remarque qu'on ne parle que très peu du dernier Eric Faye, sans doute le seul bouquin correct de cette rentrée. Eric Faye qui a toujours eu un pied dans l'imaginaire, nouvelles fantastiques, ses deux premiers romans sont clairement SF. Le peu que je sais de cet auteur me le ferais mettre sur la même étagère que Lucius Sheppard considéré comme un auteur d'imaginaire sans aucun problème. Comme quoi, même en blanche ce sont les infiltrés qui tirent le niveau vers le haut. Quand on pense aussi à Volodine....

Je me souviens avoir lu Le Général Solitude et Parij, et avoir trouvé en effet que c'était différent de la moyenne des niaiseries qu'on nous sert par ailleurs. À tel point qu'à l'époque, je voulais être publié au Serpent à plumes. Je me souviens d'ailleurs mieux de ce qu'écrivait Faye à l'époque que de ce que j'écrivais moi-même...

La rentrée littéraire le résumé abrégé :
babelio.wordpress.com/2019/09/13/nos-int...ree-litteraire-2019/

Oui, ben, je vais plutôt attendre le prochain roman d'Anthony...